asphalte-et-cumulus

je ne vous connais pas, je vous frôle, là sur le quai, épaule contre épaule

Vendredi 10 août 2007 à 22:41

Le guide :  Hum hum... Je vais vous demander de vous rapprocher un peu, de manière à ce que je puisse ne pas parler trop fort, afin de ne pas gêner les autres groupes. (un temps). Bien. Vous avez ici nos deux dernières acquisitions, qui sont, dois-je le préciser, deux très belles pièces. Achetées d'occasion chez notre principal fournisseur d'oeuvres d'art, à un prix défiant toute concurrence, et cependant dans un très bon état de conservation, vous pouvez tout d'abord admirer à votre gauche Pars vite et reviens tard, de Fred Vargas, puis à votre droite La Métamorphose de Franz Kafka. Pars vite et reviens tard a d'abord subi une petite restauration au feutre noir, afin de lui redonner sa couleur originale, et fera bientôt parti des oeuvres classées comme "admirées avec attention", dès que nous aurons le temps de l'étudier de plus près. Il est en effet utile de rappeler à notre aimable public que nous nous concentrons en ce moment sur l'étude d'oeuvres plus classiques, afin de combler un certain retard dans ce domaine. C'est d'ailleurs dans ce but que nous avons acquis le deuxième spécimen, la fameuse oeuvre de Kafka, La Métamorphose. Vous avez en effet pu constater de vous même durant la visite que cette pièce n'était pas présente dans nos collections. C'est maintenant chose faite, puisque nous l'avons obtenue cette après-midi même. Etant en excellent état, nous n'avons eu à effectuer aucune restauration, et nous nous sommes empressés de la contempler. C'est donc avec joie que je vous déclare que La Métamorphose fait maintenant partie des oeuvres "admirées avec attention". (un temps. Le guide semble mesurer l'effet produit sur les touristes et les visiteurs. Il reprend finalement ses esprits) Et bien, j'espère que la visite vous a plu, et, si c'est le cas, n'oubliez pas le guide. (Les visiteurs paraissent d'abord déconcertés, puis commencent à sourire. Le guide, quant à lui, tend ostensiblement son béret)

Jeudi 9 août 2007 à 13:35

  Je n'étais pas raciste et je volais dans tous les garages, y compris celui de mes parents, qui n'était pas le plus mauvais. Un jour, j'y découvris une friandise belge que je ne connaissais pas : des spéculoos.
  J'en goûtai un aussitôt. Je rugis : ce croquant, ces épices, c'était à hurler, un évènement trop important pour le célèbrer dans un garage. Quel était le meilleurs endroit pour fêter ça ? Je le savais.
  Je bondis jusqu'à notre immeuble, montai les quatre étages en courant et fonçai dans la salle de bains dont je poussai la porte derrière moi. Je m'installai devant le miroir géant, sortis le butin de dessous mon pull et commençai à manger en observant mon reflet dans la glace : je voulais me voir en état de plaisir. Ce qu'il y avait sur mon visage, c'était le goût du spéculoos.
  C'était un spectacle. Rien qu'à me regarder, je pouvais détailler les saveurs : c'était forcément du sucré, sinon je n'aurais pas eu l'air aussi heureuse ; ce sucre devait être de la cassonade, à en juger l'émoi caractéristique des fossettes. Beaucoup de cannelle, disait le nez plissé de jouissance. Les yeux brillants annonçaient la couleur des autres épices, aussi inconnues qu'enthousiasmantes. Quant à la présence de miel, comment en douter, au vu de mes lèvres qui minaudaient l'extase ?
  Pour être plus à l'aise, je m'assis sur le rebord du lavabo et continuai à goinfrer les spéculoos en me dévorant des yeux. La vision de ma volupté accroissait ma volupté.

Amélie Nothomb, Biographie de la faim

Comment ne pas succomber aux plaisirs de la lecture d'un passage comme celui-ci ? Qui d'autre qu'elle peut décrire le spéculoos de cette façon ? Et d'ailleurs quel auteur penserait à parler du spéculoos ? Pourquoi n'ai-je que trois livres d'elle dans ma bibliothèque ? Par quel moyen convaincre ceux qui ne connaissent pas ses bouquins de vouloir les découvrir ?

Et si vous lisiez le passage où elle parle du chocolat comme étant l'aliment divin par excellence...? Et celui où elle raconte comment elle se délecte de la beauté elle-même...? Et les moments où elle relate ses surprenantes amours d'enfance...? Et...
Et merde, allez dans une librairie, une bibliothèque cette aprèm, procurez-vous vite fait bien fait cette Biographie de la faim, laissez-vous porter par cette folle enfance, affligez-vous de cet affriolant égocentrisme, goûtez à la fluidité de ses mots,  en bref, offrez-vous une petite heure de folie.
Profitez-en, aujourd'hui il pleut... Qu'est-ce que vous seriez bien sur votre canapé, ou dans votre lit, avec un bon bouquin...

Vendredi 3 août 2007 à 22:12

Ce jour là tout était calme au lavomatic du quartier. Seuls quelques vêtements faisaient des tours dans un tambour, sous des jets d'eau et de la lessive, en l'absence de leur propriétaire. C'est alors que trois énergumènes entrèrent dans la petite pièce où somnolaient plusieurs machines. Ils s'exclamèrent devant la blancheur du banc qui y avait été installé, devant la blancheur de la table, devant la blancheur des murs, devant la blancheur du plafond, et devant la blancheur du sol. "Mais pourquoi diable les laveries automatiques sont-elles toujours blanches ? Pourquoi n'y-a-t-il pas de laveries roses, par exemple ?" se demanda une des filles du groupe. Aucun de ses deux accolytes ne lui donna de réponse claire ; l'autre fille n'émit pas un seul son, et le garçon marmonna quelques mots vaguement indistincts. Ils déballèrent ensuite un immense sac bleu, qui ne contenait que quatre éléments, tous d'une couleur beige sombre. Une ménagère expérimentée auraient reconnu dans cet amas de tissu une housse de canapé en deux parties et deux housses de coussins, mais les habitués du lavomatic n'auraient eu aucune chance de savoir de quoi il s'agissait, étant  pour la plupart de modestes étudiants déjà incapables de trier convenablement leur propre linge. Mais le lavomatic était désespérément vide, et personne ne chercha donc à deviner le contenu de ce qui fut mis dans la machine numéro douze. De mémoire de machine,  la douze n'avait jamais était aussi humiliée. Elle qui se considérait comme simple d'utilisation vit soudainement son réservoir de lessive se faire ouvrir en plein pré-lavage, se faire rouvrir lors de l'essorage, et, par dessus tout, dut changer de programme en cours de route car les trois jeunes s'étaient aperçus qu'il s'étaient trompés. Ils voulaient un lavage à 40°, et non à 60°. La douze aurait bien protesté un peu, mais elle n'en avait pas le courage. A quoi bon se mettre à faire du bruit si personne ne se donnait la peine de l'écouter ? Elle fit donc entendre aux trois jeunes son bruit habituel, mais mit au point un plan de vengeance. Ces trois idiots, se dit-elle, ne savent que pouffer dans mon dos, et se moquer du lieu où je vis : je vais leur faire vivre la plus grande incompréhension de leur vie. Elle avait en effet remarqué qu'ils avaient amenés deux doses de lessive Le Chat, mais qu'ils ne retrouvaient plus la deuxième dans tous cet amas de tissu qu'ils avaient à laver. Evidemment, dès qu'elle commença à tourner, elle sentit contre ses parois la dose de lessive perdue. Il s'agissait d'un sachet en plastique contenant deux pastilles de lessive effervescentes. Pendant que les jeunes s'interrogeaient sur la disparition mystérieuse de ces deux pastilles, elle entreprit de leur montrer qu'elles étaient bien en train de tourner avec leur linge, mais toujours dans leur emballage d'origine. Elle s'amusait à les narguer en faisant apparaître de temps à autre le sachet par le hublot. Mais les trois compères n'en furent que très peu étonnés, et se mirent à rire aux éclats, en voyant passer leurs tablettes toujours enfermées dans leur plastique protecteur, en s'inquiètant juste un peu, au cas où l'emballage viendrait à s'ouvrir lors du rinçage. Malgré son agacement grandissant, la machine ne se sentait pas le coeur de faire subir un tel sort au pauvre linge qu'on lui avait donné à laver. Ainsi résolut-elle de garder les pastilles pour elle, et d'inquiéter à nouveau les jeune sur leur disparition. Et en effet, quand ils sortirent leur housse de canapé et leurs houses de coussins, ils se mirent en vain à chercher leur lessive. La machine numéro douze riait en silence. Son rire parvint néanmoins aux oreilles du séche-linge numéro quarante, qui se vit à son tour rempli par une masse de couleur beige foncé. Mais comme les jeunes ne l'avaient pas personnellement attaqué physiquement, ni ne l'avait blessé moralement sur son mode de fonctionnement, il ne commit aucune fourberie. Il se contenta de ne pas sécher entièrement la housse de canapé, pour montrer sa solidarité à la machine numéro douze, qu'il appréciait beaucoup. Dix minutes plus tards, les trois jeunes remirent leur linge dans leur sac bleu, et quittèrent la pièce trop blanche. La machine numéro douze laissa alors éclater son rire tonitruant : elle avait gardé, en plus des deux pastilles de lessive, une des deux housses de coussins...

Epilogue :  Et quelques heures plus tard... "Je comprends pas, s'exclama la fille, on a dû la perdre en revenant, cette housse."

nda : cette histoire est basée sur des faits réels.

Mercredi 1er août 2007 à 9:41

Sur la gauche du cadre où j'essayais tant bien que mal de taper un texte sur ***** ****** *** *** ******* ******* , il y a une pub, sur fond orange, où il est écrit "salut Fred", "coucou Fred", "ouhou Fred", ça va Fred", etc etc... C'est une pub pour la zap zone d'orange. Quand l'écran devient noir de "hey Fred", on peut lire en blanc et orange "sur zap zone, rejoins 345 000 potes".

C'en est trop pour moi. On dirait que tout me nargue ; c'est fait exprès, ou quoi ? Etrange comme sonne ce "potes" à mes oreilles, comme on me demande comment va Fred...

Lundi 30 juillet 2007 à 11:45

Vous avez remarqué ? Quand vous critiquez quelque chose, il y a toujours quelqu'un pour critiquer votre critique, et dire que finalement, il n'y a rien à critiquer si ce n'est votre opinion qui elle est totalement critique (il faut toujours suivre ce qui précède, ndlr).
Bon bref, tout ça pour dire que je vais faire une critique. Mouahaha, une critique... Shut up ! So, je viens de visiter un blog. Je ne sais même plus le titre, ni si c'était celui d'une fille ou d'un garçon (mais ça doit plutôt être celui d'une fille) et là, à peine arrivée sur la page, je pique une micro-crise : "moi et mon monde" ou truc du même genre. Morte de rire, jeune fille. "Ton" monde. Quel monde exactement? Un photomontage bidon, un poème frisant le débile... c'est ça ton monde? Alors il n'est pas si différent du mien, tu sais.
Ce qui m'énerve le plus dans toute cette histoire, c'est que tout le monde fait la même chose en se croyant original. Et je hais ça. On veut tous montrer qu'on est des gens à part, mais quand on regarde deux blogs, on retrouve exactement les mêmes choses, alors que leurs auteurs se prétendent uniques. Bon, évidemment, je ne nie pas que chacun soit unique. Mais il faut bien garder à l'esprit que nous partageons tous la même chose, au fond. Chacun se plaît à s'imaginer incompréhensible pour quiconque d'autre que lui-même. Là, je suis parfaitement d'accord. C'est quand quelqu'un se met à revendiquer sa différence et le fait qu'il soit incompréhensible que je ne suis pas d'accord. C'est ça que je critique. A quoi ça sert de dire à l'autre "fais gaffe, je suis différent, tu risques de ne pas toujours me comprendre". L'autre s'en aperçoit forcément, il s'en apercevra tôt ou tard. Il n'a pas besoin d'être prévenu, j'aurais presque même envie de dire qu'il le sait de façon innée.
Malheureusement pour moi, tous les blogs sont comme ça. Même le mien. Sauf que sur le mien, ce n'est pas clairement revendiqué (et c'est d'ailleurs pour ça que je supporte très bien mon blog. héhé).
Bah oui, quoi, je ne vous ai jamais dit que j'étais différente et que je vous faisais partager mon monde. Pourtant c'est que je fais. C'est ce que je viens de faire, et là pour le coup, c'était explicite. Et pourtant, bizarrement, je ne vais pas me mettre à détester mon blog. Et pourquoi? Et bien tout simplement parce qu'il n'y a que moi qui me comprenne parfaitement...

 - Me dites pas que c'est pas clair. Il suffit de suivre ce qui précède. Si même en suivant ce qui précède, vous n'avez pas compris mon subtil raisonnement (certainement foireux, en réalité), tenez cette phrase pour vraie : "elle est différente, je ne peux pas toujours la comprendre"... -




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