asphalte-et-cumulus

je ne vous connais pas, je vous frôle, là sur le quai, épaule contre épaule

Jeudi 13 novembre 2008 à 13:37

Il existe un jeu de société, il me semble, que l'on appelle Boogle -je ne sais pas s'il est vraiment connu. Ce jeu, je me souviens y avoir joué lorsque j'étais plus jeune, disons lorsque j'avais quatorze, quinze ans : j'aimais beaucoup.

Aujourd'hui, je ne me connais plus les subtilités des règles, je ne sais plus exactement à quoi ressemble le Boogle, mais je peux encore me rappeler grossièrement de ce dont il s'agissait : il y avait des cubes, de la taille d'un dé, sur lesquels étaient inscrites des lettres de l'alphabet. On plaçait ces cubes sur une sorte de socle orange, divisé en plusieurs compartiments à la taille des cubes, puis on posait sur le socle ce que l'on pourrait appeler un couvercle, mais qui n'en est en réalité pas un. Non, en réalité, ça n'était pas un couvercle, maintenant que j'y pense : en fait, c'est le socle qui aurait dû être un couvercle, et ce que j'ai appelé couvercle qui aurait dû être le fond de la boîte. Oui, c'est cela : il faut s'imaginer une boîte avec un couvercle, mais retournée, placée à l'encontre du bon sens. J'ai donc une boîte posée à l'envers, dans laquelle il y a des dés non pas chiffrés, mais lettrés. Il s'agit ensuite de secouer la boîte, de façon à ce que les dés sortent de leurs compartiments, se mélangent, se retournent, puis se replacent plus ou moins d'eux mêmes dans leurs compartiments. Une fois que l'on a secoué la boîte, on peut jouer : dans ces lettres désordonnées, il faut retrouver de l'ordre, c'est à dire que c'est celui qui parviendra à former le plus de mots qui remportera la partie. Fascinant jeu que le Boogle !

Le problème, au Boogle, c'est quand, dans le désordre des lettres, vous ne parvenez pas à y voir clair : vous avez beau chercher, tenter de lire dans tous les sens, vous ne voyez strictement rien. Les lettres ne veulent pas se souder, elles refusent de former des mots. Aucune unité. Un R. Un W. Un E. Rien, donc. On abandonne. On secoue à nouveau la boîte. A peu de choses près, ce sont les mêmes lettres qui apparaissent, mais pas à la même place. Cette fois, on devrait y voir clair. Mais non : toujours rien. Pourquoi est-ce que je n'y arrive pas ? Pourquoi est-ce que je ne sais toujours pas former de mots ? Pourquoi est-ce que je ne vois que ce que je ne vois pas ? Pourquoi est-ce que je me dis ah, si on jouait en anglais ça serait plus simple, pourquoi est-ce que je me dis il manque un A, s'il y en avait eu un, j'aurais pu faire « bazar »...? je cherche à changer les règles, la configuration, à les tourner à mon avantage, mais ça n'est pas possible, ça n'est pas comme cela que ça fonctionne. Non. Bien sûr que non. Ce serait trop simple. J'ai décidé de jouer, et je joue ; je joue donc j'accepte les règles. Il n'y a rien de plus sérieux que le jeu. Rien.

 

Je ne joue pas au Boogle, pourtant.
Et pourtant, je joue. Je joue... à faire des dissertations. Alors que je n'en pouvais plus de ne voir que ce que je ne voyais pas, alors que mes idées ne s'assemblaient pas pour faire une dissertation, c'est l'image du Boogle qui s'est imposée d'elle-même à mon esprit : mes idées, c'était les lettres, la dissertation, c'était les mots que je devais former, la boîte retournée, c'était la khâgne.

Alors oui, je joue. Les profs n'arrêtent pas de nous le répéter d'ailleurs, qu'on doit jouer : si vous jouez le jeu de la prépa, on vous donnera votre équivalence à la fin de l'année. Je joue. Globalement, je m'amuse. Mais lorsque j'essaie d'avoir une vision moins globale, et que je me centre sur certains point, je m'aperçois que je ne m'amuse pas tout le temps. Je ne m'amuse pas quand je ne trouve pas de mots à former avec les lettres qui sont me sont données : non, là, au contraire, je me perds. Je me perds parce que je perds.

 

Et ce que je me reproche le plus, au fond, c'est d'oublier si rapidement qu'il m'est arrivé de perdre -ou de moins de croire que je perdais. Parce qu'en réalité, je n'ai encore jamais totalement perdu, et je me demande encore comment cela est possible : plus d'une fois, j'ai pensé ne pas pouvoir rendre de copie tellement tout était désordonné dans mon esprit. Mais non.

Ce que je me reproche donc, c'est d'oublier comment je suis lorsque je suis perdue. Ce que je me reproche, c'est ce que d'habitude, on ne peut reprocher, et que l'on encourage : je me reproche ma vision globale de la khâgne : ma vision qui se résume à « cela m'apporte beaucoup ». je n'ai pas l'impression que je me demande souvent ce que je perds.

 

Mais au fait, est-ce que je perds quelque chose ?

Oui ! Juste un peu plus haut, c'est écrit : « je me perds ». ce que tu perds, c'est toi, donc. Non ! ... Si... ? Oui, je me perds : mais c'est momentané. Ensuite, je me retrouve. Ah...bon. Soit. Mais à force de se perdre momentanément, n'est-ce pas la perte totale de soit que l'on risque ? Je ne sais pas. Il suffit simplement que les moments où je me perds soient suffisamment espacés, non ? Eh ! Moi non plus je ne sais pas. J'interrogeais, c'est tout ! C'est malin; je n'ai pas besoin de ça. Ouais euh faudrait savoir, tu viens de te demander si tu demandais assez ce que tu perdais. Moi je ne fais qu'essayer de t'aider. Genre. Mon webmaster va m'aider à résoudre mes problèmes personnels. Haha. Je ne vois pas ce qu'il y a de choquant ! D'abord, ça fait longtemps que je ne suis pas intervenu, et puis d'ailleurs, ça se voit, puisque ce blog perd des visiteurs. Il fallait bien que j'agisse ! Oui, bien sûr... Je pouvais rattraper la situation toute seule, hein ! La preuve, c'est que c'est moi qui ai décidé d'écrire un nouvel article ! Certes. Mais c'est parce que des tas de questions se bousculaient dans... Pas que ! Mais si ! C'est quand on va mal que l'on écrit. Non, ça n'est pas vrai ! Quand je suis contente, je l'écris aussi. L'autre jour, j'ai dit que j'aimais les gravures que j'avais vues à la librairie, et j'étais contente. Hum, euh, les gravures, justement, il faut voir à quoi elles ressemblent, hein : noires, oppressantes... Peut-être. Peut-être pas. Toutes ne dégagent pas la même chose. Et puis d'abord, pourquoi en parler ? Il n'y a que moi qui les ai vues ! J'ai déjà dit quelque chose à ce sujet ; alors je me contenterai de dire que je les ai vues aussi, en même temps que toi...

 

Il faut clore le débat. Pauvres lecteurs !

Si long ! Si peu fréquent !

 

tous les cris les s.o.s

crache ton venin

Par versager le Jeudi 13 novembre 2008 à 15:47
Si long, c'est pas un problème, si peu fréquent...
Bref.
Moi non plus j'arrive pas à remettre les lettres dans l'ordre. Parfois je zappe et je tombe sur les chiffres et les lettres. Il y a un tas de lettres et un temps limité. Je ne vois que des combinaisons incompréhensibles, ou à la limite des mots de trois à quatre lettres, paniqué par le nombre de lettres, les combinaisons possibles, je n'arrive pas à en faire une seule. Et là, le candidat dit calmement, presque déçu d'avoir trouvé un mot trop évident : "symplectique".
Ma pensée n'arrive pas à s'ordonner, elle n'est pas fluide, elle avance par à-coups, je progresse peu à peu, en rajoutant par ci par là des idées quasiment déconnectées du reste, j'accumule des idées, parfois même juste des phrases, je les entasse et au final il n'y a que ça, un tas. C'est pour ça que je fais mes dissertes sur ordinateur, pour pouvoir revenir en arrière, supprimer, modifier, rajouter, changer à loisir au fur et à mesure que mon esprit fait de petits bonds en avant (parfois en arrière) au lieu de couler uniformément, le problème étant bien sûr qu'entre deux sauts, on peut sortir du sujet et partir sur autre chose.
J'ai un esprit qui se déplace en pogo stick.
Tout ce commentaire pour dire quoi ? Comment je fais pour ordonner ma pensée au final, lui donner une forme lisse et uniforme et rendre des dissertations acceptables ? Je vais te le dire : Je ne le fais pas. Je n'ai jamais réussi à dépasser ce problème et je rends toujours des torchons dont j'ai honte.
Ou en fait si. Parler permet de structurer la pensée. Quand j'ai un sujet de dissert dont je parle avec quelqu'un, qu'on en discute un petit peu, je pense à ce que je peux lui opposer, à ce que je peux dire pour développer, et c'est là que ça s'organise, le lien logique arrive dans la conversation, et on s'achemine vers un but sans le perdre de vue. Malheureusement, il est pas franchement possible de parler durant les devoirs sur table. On nous demande d'être des génies dans l'instant, et ça, je n'en suis pas capable.
 

crache ton venin









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